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Des petits remontants hivernaux à portée de main

Pour bien des gens, l’hiver est considéré comme une saison morte…voire moche! Pourtant, ceux qui se plaignent des moustiques et de la chaleur estivale auraient tout intérêt à y trouver la saison rêvée. Qu’à cela ne tienne, les journées plus courtes engendrent parfois de la morosité, une perte d’énergie et le désir de s’encabaner…ou de migrer vers le sud.

Nos ancêtres européens et autochtones savaient très bien que l’hiver était difficile. Elle apportait généralement son lot de problèmes de santé, dont les rhumes, les grippes, le scorbut, la dépression et quoi encore? La promiscuité obligée favorise la transmission de ces maladies.

En absence de pharmacies…et de pharmaciens, il fallait se tourner vers la NATURE, qui héberge une quantité impressionnante de petits remontants. On pensait alors aux plantes médicinales et à celles qui apaisaient suite à de très grosses journées à couper du bois de poêle pour l’année suivante, ou en rentrant du train, après avoir tiré les six vaches…On ne parlait pas vraiment de traire les vaches à l’époque!

La forêt boréale offre plusieurs plantes qui remplissent ces fonctions : thé du Labrador, menthe sauvage, petit thé des bois, herbe à dindes, savoyane, aiguilles de sapin et d’épinette, feuilles de cèdre et un lichen, l’usnée barbue. De nos jours, s’ajoute à cette pharmacie naturelle, le chaga. Jadis, on était précautionneux : les récoltes de ces médicaments naturels se faisaient au meilleur moment de l’année en prévision de l’hiver.

Thé du Labrador

Arbuste de tourbières ou de sous-bois humides de conifères. La surface inférieure des feuilles est duveteuse, blanche chez les jeunes feuilles et rousses chez les plus vieilles. Il est très important de bien le différencier du kalmia, un arbuste toxique aux feuilles sans poils qui lui ressemble énormément et qui pousse sur les mêmes sites. Le thé du Labrador possède une activité antimicrobienne et il est antidiabétique. Stupéfiant léger, il affiche également des propriétés antidouleurs. Pour en faire une tisane apaisante, il est préférable de déchiqueter les feuilles coriaces avec un moulin à café; son goût est ainsi grandement amélioré. Même si les feuilles peuvent être cueillies à l’année, le meilleur temps se situe pendant les deux dernières semaines de juillet, moment où se produit son pic aromatique. Si on souhaite une récolte durable, il est préférable de s’abstenir de cueillir le bourgeon apical à partir du mois d’août puisque l’arbuste est en phase d’aoûtement, se préparant pour l’hiver.

Menthe sauvage

Cueillie en été alors qu’elle est en fleurs, apporte des bienfaits car elle diminue les symptômes des maux de tête, de la fièvre, du rhume et de la toux. Ses feuilles séchées se combinent très bien d’ailleurs à une tisane au thé du Labrador. Elle a également des propriétés digestives. La menthe sauvage dégage une odeur de paparman rose, celle que nos grands-mères cachaient dans la poche de leur tablier. Dans une boisson chaude, quel réconfort!

Herbe à dindes

Cueillie également en été, en fleurs, et suspendue pour le séchage contient de puissants bactéricides. Étant jeune, pendant l’hiver, ma mère me la préparait alors que j’avais de la fièvre ou un rhume. En tisane refroidie, elle soigne en plus les maux de tête et les problèmes respiratoires.




La Savoyane

Dans le cas de la savoyane, ce sont les rhizomes jaune or qu’il faut cueillir en été, en creusant un peu dans le sol. Cette plante vivace des sous-bois humides de conifères ressemble beaucoup au fraisier à cause de ses feuilles basilaires composées de trois folioles très luisantes. Chez les Algonquins, le rhizome servait à teindre le cuir alors que chez les Blancs, cette partie très amère était utilisée contre le scorbut.

Sapin et épinette

Les aiguilles de sapin et d’épinette sont cueillies de préférence alors qu’elles sont encore d’un vert tendre au printemps et congelées. À cause de leurs propriétés calmantes, antiscorbutiques et antiseptiques elles aromatisent une tisane chaude lorsqu’on a la grippe accompagnée d’hypersécrétion de mucus. Les aiguilles sont très riches en vitamine C et, déchiquetées, elles font un excellent punch boréal.

Cèdre

À cause de leurs propriétés antimicrobiennes, antioxydantes et antivirales, les feuilles aromatiques du cèdre ou thuya occidental sont utilisées contre la toux, le rhume et les douleurs chroniques. Elles apaisent les maux d’oreilles, de dents, les coliques et les problèmes de vessie. De plus, ces feuilles servent à fabriquer du sirop ou de la gelée : délicieux sur des toasts sur un rond de poêle!

Usnée barbue

Les lichens ne sont pas des plantes. En fait, ils sont composés de deux êtres vivant en symbiose, une algue bleu-vert et un champignon. Les lichens adoptent plusieurs formes, la plupart du temps collés sur les roches ou sur le tronc des arbres, ou encore en forme de corail, comme la mousse à caribou (cladonie). D’autres lichens sont suspendus aux branches des arbres comme des cheveux ou des poils d’ours. L’usnée barbue est un lichen gris en forme de longs cheveux poussant sur des branches de conifères vivants ou morts. J’ai utilisé ce lichen à quelques reprises alors que je sentais ma gorge irritée et une grippe à l’horizon. Bouillie dans l’eau, l’usnée barbue est un remède très efficace.

Chaga

Depuis la dernière décennie, nombreux sont ceux qui ont commencé à cueillir et à consommer un champignon parasite du bouleau blanc ou jaune, le chaga. À cause de ses propriétés antimicrobiennes et antioxydantes, le chaga dégusté en café, permet de prévenir des problèmes de santé, principalement ceux qui apparaissent en hiver. En effet, en consommant du chaga à tous les jours, nombre de personnes passent cette saison sans attaque de rhume et de plus, le champignon donne de l’énergie. Il est recommandé de cueillir les chancres, sortes de boules noires crevassées, pendant la période hivernale alors que l’arbre est au repos. Toutefois, il peut être cueilli à l’année : ses propriétés médicinales seraient légèrement différentes d’une saison à l’autre.

Conclusion

La nature boréale peut donc devenir une source de réconfort pendant la saison hivernale. Testées depuis plusieurs centaines d’années, principalement par les Autochtones, la plupart des plantes qui la composent ont des propriétés médicinales : elles préviennent les maladies courantes comme le rhume ou la grippe et de plus, dans certains cas, elles sont une source importante d’énergie, ce qui n’est pas à négliger pour ceux qui considèrent que l’hiver est une saison trop longue et épuisante.

Pourquoi ne pas profiter au maximum de l’hiver sans moustiques, sans grandes chaleurs, avec ses paysages créant à chaque fois l’émoi sur les réseaux sociaux. Pourquoi ne pas en profiter pour prendre l’air frais, froid et pur, en skis de fond ou en raquettes. Nous n’avons qu’à tendre la main et la pharmacie, avec son petit remontant, est tout près parfois même dans sa cour arrière.